Heures d’ouverture : 9h00/12h00 13h00/17h00
Alors ôtons le doute de suite : oui, Jean-Noël et Tifenn proposent également des huîtres au détail, mais c’est de loin anecdotique au regard de l’activité de vente en gros. Comment un ostréiculteur aussi passionné par son produit pourrait-il vous refuser le plaisir de la dégustation ? Et bien si vous vous pointez en dehors des horaires d’ouverture. Et le chantier c’est à droite, au bord de l’eau.
Comme il me parait indélicat de vous parler de l’huître sans aborder l’histoire de l’homme et de sa vision du développement durable, un peu d’histoire.
Lorsque les premières exploitations ostréicoles prirent place dans la Ria, à la fin du 19e siècle, un dénommé Vincent Tonnerre originaire de l’Ile de Groix, obtient l’autorisation « d’établir un parc à huîtres sur la rive gauche de la rivière d´Etel longeant la rive droite du chenal Ster-er-Istrec au sud et à la suite du parc 545 (parc 1132) (lien)« . On est le 21 novembre 1895 et Vincent Tonnerre est l’ arrière arrière grand-père de Jean-Noël. Ajoutons qu’à l’époque, le déclin de la pêche sardinière coïncide avec le développement du transport ferroviaire ce qui favorise les motivations ostréicoles. L’huître a toujours été un produit prisé, alors si on peut l’expédier plus facilement…
L’huître naturelle, née en mer, élevée en mer
Sur la rive du Listrec on a toujours élevé de l’huître naturelle, plate ou creuse. La plus grosse production est aujourd’hui creuse mais la plate fait gentiment son retour, grâce à un traitement attentionné des professionnels locaux. Et parmi les premières attentions, il y a tout le travail de fond effectué pour la qualité des eaux de la Ria. Jean-Noël Yvon est un des précurseurs du dialogue interprofessionnel local. Avec son camarade de jeu Louis Hervé, agriculteur, ils commencent en 1996 à développer une action de sensibilisation aux bonnes pratiques essentielles à la préservation de la qualité des eaux du bassin versant. Cette énergie a permis à terme la création du syndicat mixte de la Ria d’Etel, une structure fédératrice des communautés de communes concernées, des entités professionnelles et privées présentes sur le territoire, dont une des missions principales est la qualité des eaux.
Les huîtres que vous retrouvez sur les marchés sont de plusieurs origines :
– huîtres naturelles : les huîtres délaitent en mer l’été, sous l’influence de la chaleur de juillet. Trois semaines plus tard des millions de larves vont chercher un collecteur, naturel ou artificiel, afin de s’ancrer. Trois années plus tard, elles sont prêtes à la commercialisation.
– huître d’écloserie : pendant une partie de l’année plus importante, une sélection de géniteurs va produire des larves dans des conditions contrôlées. Les larves vont se fixer sur des micro-brisures de coquilles d’huîtres et n’auront pas besoin d’être séparées physiquement du collecteur (opération de détroquage).
– huître triploïde : une huître d’écloserie sur laquelle on effectue quelques modifications chromosomiques, qui se retrouve donc avec 3 jeux de chromosomes en lieu et place des deux jeux chez l’huître naturelle comme chez une bonne partie des espèces qui peuplent la planète, dont l’homme. Ces trois jeux lui confèrent un intérêt particulier : la stérilité. Pour un produit dont on vante les vertus aphrodisiaques, c’est un paradoxe de goût. Alors plutôt que d’utiliser son énergie à assurer sa descendance, la triplo se contente de grossir plus vite – 2 ans pour la retrouver sur les étalages – et ne présente pas de laitance – théoriquement – en période touristique estivale, sur la côte bretonne et ailleurs.
Inutile de vous dire que lorsqu’on élève l’huître de génération en génération, avec patience et passion, la triplo n’a pas bonne presse dans le dossier développement durable. Ici comme ailleurs le productivisme est une source de revenus à court terme qui agit au détriment de la préservation naturelle de la ressource.
Les anciens considéraient que l’huître se consomme les mois en « R », de septembre à mai, pour faire plus simple. A Listrec, elle est élevée en poche ou bien draguée sur les parcs. Les poches sont retournées régulièrement. Les algues vertes qui se développent via photosynthèse sur les poches grâce à la lumière du soleil sont ainsi privées de lumière et se décomposent dans l’eau en fournissant des nutriments pour d’autres espèces. Les éponges et d’autres algues qui se développent à l’abri du soleil sous les poches subissent le schéma inverse. Lorsque se profile la période de laitance, les manutentions sont beaucoup plus attentionnées afin de limiter les maltraitances – et donc la mortalité – sur une huître affaiblie par sa priorité du moment : se reproduire.
Ceux qui n’apprécient pas les laitances estivales pourront découvrir avec bonheur les huîtres chaudes, au four ou au barbecue. Des recettes à venir. Les ostréiculteurs disposent également d’une technique de délaitage, qui consiste à déposer les poches sur les tables les moins souvent couvertes par l’eau. L’huitre est ainsi confrontée à une chaleur inhabituelle qui l’oblige à larguer ses laitances. La mer qui remonte en fin de marée passe la balai.
Les abers bretons sont des zones naturellement propices à la production ostréicole, comme ici la Ria, où l’eau douce de la rivière d’Etel mélangée à l’eau salée de la mer permettent un plancton mobile et renouvelé riche en minéraux. Demandez à votre fournisseur la provenance de vos coquillages , et n’hésitez pas à leur recommander le blog très fourni de Tifenn sur la culture de l’huître naturelle de la Ria d’Etel.
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